Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :32–Les poèmes de Mohammed Derkaoui :32-8:Schizophrénie

Mohammed Derkaoui

 

Des mots..
Défilent avec son haleine grisâtre.
Lui disent qu’il est génie,
ces mots de génies.
Des gestes embastillent son être,
son être prédéfini.
Des gestes que tant d’ancêtres ont réitérés ;
tant d’éclairés ont bannis
avec des sèmes de mots infinis.
Magnéto des jours qui courent ,
Il ressasse son être par ces infinis,
fige son être façonné.
Des mots et des gestes
écartèlent ce corps
au bord d’un océan envenimé
Nul matelot n’ose s’y aventurer..
Seule l’antenne d’un navire à l’horizon,
lui Semble ,à vol d’oiseau,
à portée de main..
il prêche des mots avalés ,
sous la tente du désert ,dit-on, bénit.
(…)
Des mots rongent mon cervelet,
paralysent ma destinée,
Me disent qu’il est temps
de briser le para- de l’ouïe,
qu’il est temps d’embellir
les sèmes /semences
des maîtres génies.

Avec l’arrivée de ce nouveau poète auquel nous souhaitons chaleureusement  le bienvenu, notre groupe  atteint la cinquantaine, y compris ceux qui se sont retirés depuis la création de cet espace  en 2009 .Et comme à notre accoutumée , nous ne faisons pas attendre  les nouveaux venus  plusieurs jours  avant de voir leur premier poème lu et commenté . Avec  ce premier poème qu’il nous propose, nous voici déjà devant un genre auquel nous ne sommes pas habitués dans cet espace, celui du portrait  satirique. A première vue  et d’après plusieurs indices dispersés  ça et là tout au long du texte  , notamment les vocables qui renvoient à l’inspiration et à l’usage des mots (  lui disent qu’il est génie  –  ces mots de génies  – des maîtres génies – des mots.. défilent avec son haleine grisâtre   – des sèmes de mots infinis  – des mots et des gestes écartèlent ce corps   – il prêche des mots avalés   – Des mots rongent mon cervelet  – magnéto des jours qui courent ) le personnage dont ce portrait reproduit les traits appartiendrait à l’entourage direct de l’auteur et plus précisément  à son milieu littéraire. La deuxième remarque qu’on peut  faire   est que ce portrait vise le dénigrement unilatéral du personnage décrit et la condamnation de la catégorie humaine qu’il représente ce que montre l’amplification  à outrance des  défauts de caractère  dont il est atteint  (  schizophrénie-  des mots.. défilent avec son haleine grisâtre   – des gestes embastillent son être, son être prédéfini – il ressasse son être par ces infinis – seule l’antenne d’un navire à l’horizon, lui Semble ,à vol d’oiseau, à portée demain.. –  il prêche des mots avalés   ) et que résume bien le mot  “pédantisme”   qui couvre plusieurs notions péjoratives telles que  la sottise, l’affectation,   la vanité et l’ostentation. Cependant, l’auteur s’est tu sur les éventuelles qualités  même minimes de ce monsieur  qui, s’il est réellement un génie – et tous les vrais génies sont plus ou moins psychopathes – mériterait  qu’on supporte de lui tous ces mauvais comportements. Le grand poète arabe ancien Al Moutanebbi المتنبي  ne souffrait-il pas de mégalomanie  ?Et pourtant combien de poètes arabes au cours des dix derniers siècles ont réussi à s’élever à son niveau ?

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