Mémoires d’un critique : Les attitudes changeantes des poètes par:Mohamed Salah Ben Amor

Noureddine Sammoud

Au mois de juin 1990, la fondation nationale pour la traduction, l’établissement des textes et des études « beit el hikma » sise à Carthage  qui sera trois années après l’académie des sciences, des lettres et des arts me fit paraître une anthologie de la poésie tunisienne moderne et contemporaine que j’avais composée sur sa demande. Et bien que le nombre des poètes et poétesses dans le pays  à cette époque selon mes statistiques personnelles fût près de 1000, les recommandations de cette institution étaient strictes : cibler sur la qualité et non sur la quantité et ne retenir que vingt poètes au maximum.

Mais comme je connaissais de près la poésie tunisienne, j’avais trouvé cette restriction très sévère  et porté ce nombre à cent quitte à faire avorter ce projet.

Dès les premiers jours de la parution  de cette anthologie sur le marché, une tempête de réactions violentes de la part des poètes qui n’y étaient pas retenus se déclencha et s’étendit à toute la presse .Et malgré que sa parution eût coïncidé avec l’invasion de l’Irak par les Américains et leurs allés les articles à son encontre contre avait dépassé de loin ceux qu’on avait écrit sur  cette guerre. L’un de ces poètes, feu Abdallah Malek Gasmi, avait écrit à lui seul vingt articles.  Et le cyclone s’était poursuivi jusqu’au mois de mars de l’année 1991 .Parallèlement à mon anthologie, la fondation avait fait paraître une anthologie du roman et de la nouvelle en Tunisie  composée par mon ami Mustapha Kilani .Mais elle passa inaperçue, tellement les romanciers et les nouvellistes tunisiens sont compréhensifs et calmes alors qu’il n’en avait retenu que quelques uns .

Un jour alors que ce cyclone faisait rage, l’un de mes amis intimes ,le professeur universitaire d’anglais Féthi Dali qui enseignait avec moi à l’institut Bourguiba school à l’avenue de la liberté à Tunis,  se trouvait dans cette avenue, quand le poète Noureddine Sammoud  qu’il connaissait depuis des années car ils avaient enseigné ensemble au secondaire au lycée secondaire de Nabeul passa près de lui par hasard Du coup, Féthi lui demanda son avis sur la polémique qui se déchaînait  autour de l’anthologie.

Sans trop réfléchir Noureddine lui dit : « A mon avis ,Mohamed Salah Ben Amor a commis une faute grave  car cette anthologie n’est pas la sienne mais du ministère de la culture  et il aurait dû y insérer tous les poètes sans distinction »

-« Mais, lui  répondit Féthi, le ministère lui a demandé de composer une anthologie et non une encyclopédie et le mot anthologie sous-entend nécessairement  faire un choix»

« Dans ce cas, il aurait dû s’excuser au ministère et décliner cette proposition travail .En tout cas, Dieu lui a envoyé Abdallah Malek Gasmi qui lui a donné une belle leçon que j’ai bien appréciée»

« L’As-tu lue ?, lui demanda Féthi

-« Non parce qu’elle a été retirée du marché quelques jours après sa distribution »

-« Moi, je l’ai lue parce que Ben Amor m’en a offert un exemplaire et il t’y a bien présenté »

« Au oui ? j’aimerais bien la lire »

Fehi, qui habitait tout près de l’institut Bourguiba des langues vivantes, fit vite un saut chez lui et lui ramèna le livre.

Noureddine l’ouvrit  et  alla directement aux page où il figure. Il lit attentivement la biographie critique que je lui avais faite puis les poèmes que je lui ai choisis pour voir s’il n’y a pas de fautes de puis dit à son interlocuteur

«  En toute franchise depuis quand Abdallah Malek Gasmi était un poète pour qu’il réclame d’être retenu  dans cette anthologie ? ».

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