Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor : 26–Les poèmes de Gaëtan Parisi : 26 -23 :Espoir

Gaëtan Parisi

Je rêve 

Je rêve et j’ai peur

Peur de mon réveil 

Et si ces images ne parlaient d’aucune aube vermeille 

Le vide est une présence amère

Un spectre aux couleurs austères 

Où seul l’espoir assume une onde claire de lumière 

Une prière

 

Au risque de me damner à jamais

Je veux revivre ce que mon cœur aimait

J’imprime ces images en polychromie 

Sur toute mon anatomie 

Je veux garder sur moi 

Et en moi

L’espoir dépositaire 

Des graines de blé vert

D’un avenir salutaire

Dans ton univers

 

Je rêve 

Je rêve d’un rêve sans fin

Un rêve sans les images indolentes 

Mais avec les plus souriantes

Ton retour 

Ton amour

Ses fragrances  

Ses transes

 

Comme “Dakiki” le poète guèbre 

J’aspire à l’excellence de la vie 

Une vie en ta compagnie 

La victoire du jour sur les ténèbres

Je veux ton sang comme succulence rouge de mes envies

Je veux les baisers de tes lèvres couleur rubis

Je veux me balancer au son de la harpe 

Et ainsi rebondir sur l’escarpe 

De la muraille des religions

Comme ultime espérance

La délivrance 

De ma passion 

 

Je rêve 

Quel est ce rêve 

Sur le seuil de la fenêtre  entr’ouverte

Attendant que le matin se lève

Pour s’envoler comme une feuille verte

 

Pour essayer de saisir le fond de ce poème qui tourne, comme presque la totalité des écrits de cet auteur,  autour de la rupture amoureuse, il est utile de se rappeler les étapes par lesquelles passe généralement, selon  les psychologues,  le partenaire qui vit cet événement douloureux : d’abord le choc qu’il lui fait subir  ensuite la négation du nouvel état de fait pourtant évident et le refus de l’accepter,  s’en suivra une  colère violente et destructrice à l’encontre de l’ex-bien-aimé ( e ) mélangée à un désir de vengeance, puis  une auto dévalorisation née de la sensation que l’expérience malheureuse qu’il vient de vivre est le résultat d’un échec .Ensuite , la courbe descend petit à petit vers le dénouement avec  l’acceptation du fait accompli avant d’entamer  une reconstruction qui sera plus ou moins longue.

Dans ce poème, le locuteur, tout en étant sujet à cet événement tragique, se maintient dans l’étape de la négation, en se faisant l’illusion que l’amour perdu est récupérable. Et il va dans ce sens jusqu’à l’extrême, en se convaincant que l’impossible est possible et en vivant  le désespoir, par le biais du rêve, comme un  espoir. Là, le cas du locuteur peut être qualifier de  pathologique, étant donné que  la sensation qu’il éprouve naît généralement d’une  rupture totale avec la réalité (Je rêve / Je rêve et j’ai peur/ Peur de mon réveil/  Et si ces images ne parlaient d’aucune aube vermeille   ) . Ce qui est   l’un des signes évidents de la psychose. Dès lors, nous comprenons que le discours qu’il se tient dans la totalité du poème peut bien être un délire psychotique .Et qu’y a –t-il d’étrange en cela  puisque que l’Amour, le vrai , relève de la même zone  qu’occupe la folie dans la psyché humaine : celle de l’irréel?

Stylistiquement, ce poème est agrémenté, de bout en bout, d’images finement ciselées avec, en parallèle, un rythme interne toujours croissant, en concordance avec l’état d’âme du poète (Je veux ton sang comme succulence rouge de mes envies /Je veux les baisers de tes lèvres couleur rubis /Je veux me balancer au son de la harpe/Et ainsi rebondir sur l’escarpe/  de la muraille des religions/ Comme ultime espérance/ La délivrance/ De ma passion).

 

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