Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :8 – Les poèmes de José Le Moigne:8 -7 : Vortex

José Le Moigne

 

Faites donc de moi
ce que bon il vous semble
je n’ai plus pour totem
l’aigle royal ou le guépard
mais l’humble coquillage
dont le vortex vide
fait entendre la mer

 

Dès le titre, le poète nous met en face d’un faisceau extrêmement dense de significations, aussi différentes les unes des autres que dénote ce mot multi-sémique « vortex » ( du latin vortex, -icis) qui désignait à l’origine « un tourbillon creux qui prend naissance, sous certaines conditions, dans un fluide en écoulement ou un « ensemble de nuages enroulés en spirale, spécifique d’une dépression ».Puis, il a acquis un très grand nombre de nouveaux sens dans les deux domaines scientifique et artistique, découlant tous de la notion première de tourbillon, soit au sens propre ou au sens figuré dont : Vortex, phénomène physique et météorologique Expériences VORTEX (Verification of the Origins of Rotation in Tornadoes EXperiment), deux campagnes de prises de données sur les tornades effectuées aux États-Unis / Vortex de biologie moléculaire est un matériel servant à mélanger des solutions / Vortex, un groupe de jazz-rock français / Vortex, un groupe de death metal québécois / Vortex, une série de bande dessinée française de science-fiction/ Vortex, un roman de science-fiction de Robert Charles Wilson paru en 2011…etc. Cette polysémie plonge le lecteur, dès le premier abord, dans un enchevêtrement de connotations et de sens seconds ou pour reprendre l’expression de Roland Barthes « une galaxie de significations ».Ce qui a pour effet de renforcer la poéticité du texte .Un autre élément pertinent retient aussi l’attention dans ce mimi-poème est l’exclusion qu’exprime ici la conjonction «  mais » dans le 4ème vers et qui renvoie à une idée dont le locuteur s’est volontairement départi, en l’occurrence l’attachement à la philosophie de la force (je n’ai plus pour totem l’aigle royal ou le guépard) probablement celle que préconisait Nietzsche et ce, pour adopter une nouvelle philosophie de vie, basée sur la contemplation et le rêve (l’humble coquillage dont le vortex vide fait entendre la mer).Ces éthiques sont, en réalité, toutes les deux romantiques bien qu’elles fassent partie de deux branches de ce courant. Le grand poète tunisien Aboulkacem Chebbi (1919 – 1934 )qui en était l’un des plus grands représentants n’avait-il pas dit :

Je resterai en vie malgré le mal et les ennemis

Tel l’aigle sur le haut sommet ?

Un texte concis mais foisonnant de significations et dont l’importance est qu’il nous éclaire surtout sur l’évolution de l’expérience de son auteur au cours de son parcours poétique.

 

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