Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :5 -Les poèmes de Philippe Correc :5 -1: Parti pour ne plus revenir

Philippe Correc

 

Parti pour ne plus revenir
Vers les lumières de la ville
J’avais banni mes souvenirs
Pour une existence fragile
Un besoin de réaliser
Plein d’autres choses de ma vie
Ne pas la laisser s’enliser
J’aspire à bien d’autres envies

Je reviens sur mes pas
Entre l’eau et la terre.
Je reviens sur mes pas
Et le phare m’éclaire.
Je reviens sur mes pas
Pour un bout de chemin.
Je reviens sur mes pas
Vers un autre demain.

J’avais pensé faire fortune
Trouver l’amour dans la cité
Mais c’est plutôt pour l’infortune
A laquelle j’ai milité.
Pas facile de trouver sa place
Ce monde est si impersonnel
Je suis resté à l’interface
Sans plus jamais voir d’arc en ciel.

Je reviens sur mes pas
Entre l’eau et la terre.
Je reviens sur mes pas
Et le phare m’éclaire.
Je reviens sur mes pas
Pour un bout de chemin.
Je reviens sur mes pas
Vers un autre demain.

Mon avenir est tout tracé
Je reviens vers toi te bercer
Et si tu veux toujours de moi
Je serai plus heureux qu’un roi.
J’apprendrai à vivre autrement
Profiter de l’air et du temps
On jouera à des jeux d’amants
A deux rien n’est plus important.

 

Philippe Correc qu’on peut appeler, à juste titre, le poète du rythme démontre, à l’occasion de l’écriture de ce poème, qu’il est possible d’écrire de bons poèmes sans recherche linguistique, ni texture métaphorique, à condition de posséder une ouïe intérieure fine ou, si vous le voulez, une imagination auditive féconde. Ce qui est, à vrai dire, la qualité originelle de tout vrai poète , vu que le premier élément distinctif qui différencie la poésie de la prose est le rythme sonore .En effet, si les images inédites sont rares dans ce texte, pour ne pas dire inexistantes , la structure rythmique est très finement conçue .Et cela se perçoit dans la régularité des rimes qu’il a choisies et qui sont toutes  croisées ainsi que dans l’usage massif de l’anaphore par la répétition, au début de neuf vers, de la phrase « Je reviens ».

Néanmoins, il faut reconnaître que le poète n’a pas compté seulement sur ce côté sonore malgré son importance indéniable , car en choisissant, dès le début, de narrativiser son poème, il s’est offert l’occasion d’user du procédé du camouflage afin d’exciter la curiosité du lecteur, en ne dévoilant l’identité de l’allocutaire que dans l’ultime strophe où nous apprenons qu’il s’agit d’une amante alors que tous les indices faisaient penser jusque-là à un lieu qui serait le contraire de la ville (Parti pour ne plus revenir vers les lumières de la ville) donc une compagne ou un village. Et nous saisissons que le poème a été écrit sur un arrière-plan de séparation amoureuse. Un texte séduisant, très plaisant à lire, écrit avec une grande subtilité…

 

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