Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor : 2- Les poèmes d’Alain Minod : 2-10 : Au déshabillé de l’ombre

Alain Minod

 

Bonne sous l’ataraxie du silence :

La plèvre d’où émane la respiration chuchotante

Laisse tracer le sang d’une parole

Attachée à un cœur

Âme pulsant son cours

Au déshabillé de l’ombre

Elle brille sur tes lèvres –

Soulignée par

Un sourire

Deviné

Tropismes fléchés dans ta chair

Comme fleurs s’épanouissant –

Tu accueilles le flambant neuf

De la caresse

Ogive pointée de ton regard

Sur la pauvre étoile

Qui tangue dans

Mes doigts

Toi – remuant mon horizontal lointain

Sur le terre-plein qui traverse

Ta tendresse

L’exil mâché par tes mots

Qui s’étirent en

Dansant –

Lance la surprise verticale

De l’instant

Qui expose ton corps

Au plus hâlé des

Désirs pour

Le bateau libre de

Tout horizon

Pendant que s’épuise

Le mystère de

Ton nom

Au creux ferré

De tes amours –

Qui attrape les cordes et l’ancre

Pour aller lâcher des

Feux d’artifice

Vers le large ?

Au plus happé de ton lointain

Ils résonnent avec

Ta parole

Que tu traces comme l’écume

Sous ton vent de

Sable

On la retrouve :

L’inattendue faisant brûler

Le chiffon du désespoir

Et couvrant de soie

Les grandes épaules

D’Eole qui véhicule

La promesse

Pour

Les plus égarées

Les plus fictives

Rencontres

Fixées

Sans autre orientation

Que le lit d’un

Fleuve à son

Embouchure

Fleuve d’amour

Que drainent tes mots devenus

Compatibles avec

Le désert urbain

Où se perdent

Les solitudes

 

Soucieux, comme à son accoutumée, d’atteindre dans sa poésie le plus haut degré possible de poéticité, notre poète a déployé, comme nous le constatons clairement, un effort considérable pour purifier sa langue des sens lexicaux dénotatifs .Et le meilleur moyen pour y arriver est, comme il l’a fait, de vivre pleinement l’instant poétique , en enrayant complètement l’outil de penser et donnant libre cours à ses compétences siégeant dans l’hémisphère droit du cerveau ( imagination, perception , attention, intuition, affectivité …) .Dès lors, le poète se libère des contraintes qu’exerce sur lui la réflexion logique et n’a, par conséquent, que glaner les trésors sémantiques que lui offre son monde intérieur, en passant du réel plat et insipide à l’imaginaire, le règne, par excellence, du merveilleux et du fantastique qu’il exprime sous formes de métaphores inédites, de fantasmes bizarres , de sensations étranges , de visions abracadabrantes…Et le tout se déverse en des flots bouillonnants, du début du poème jusqu’à sa fin .Cet état que l’homme contemporain commun assimile à une forme de folie est, en revanche, fort recherché par le poète parce qu’il lui procure les expressions et les images originales dont il a besoin pour fuir la réalité . Formellement, ce poème a été conçu sous forme d’un discours noué soit entre un locuteur et soi-même donc un monologue, soit adressé de lui à un ou une allocutaire. Quant au contenu sémantique, il nous est éclairé par les trois derniers vers (le désert urbain où se perdent les solitudes)qui renvoient à l’état d’isolement et de marginalisation psychologiques dont souffre l’intellectuel dans l’espace urbain qui a passé de « la ville-monde » à une ville inhumaine ou plus précisément « une ville-monstre » où la sérénité , la sécurité et l’ataraxie ont cédé la place à l’angoisse, l’anxiété et l’inquiétude .Un poème finement ciselé dans lequel les inventions linguistiques déroutantes s’accordent harmonieusement avec le message profond véhiculé.

 

 

 

 

 

 

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