Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor : 2- Les poèmes d’Alain Minod : 2-1:Pour allumer des étoiles

Alain Minod

Au temps de mon silence en aparté

Il y a comme une langueur de la veille –

Au milieu des paroles en majesté

J’habille un poème pour qu’il me seille

De parcourir un chemin dans ces places

Où ne se fatigue ma solitude

A se remplir de toutes belles traces

Que je fais planer loin en altitude.

 

Ce n’est pas  jeu où se traînent des vers

C’est un feu où j’entraîne ma bohème

La beauté fait irruption comme un lemme

Éclaircissant tout mon verbe à revers

De ma situation là sans fortune

Pour allumer la moindre des étoiles

Sans même penser à gober la lune –

Juste pour peindre ma petite toile.

 

Et – ainsi toute distance effacée

Je me noie dans tous les rires qui pleuvent

Les associe aux rêves condensés

Par l’ivresse de désirs qui se meuvent

En quarterons de prières indociles

Que le creux de la ville n’assassine

Car – par ce milieu de  terre des îles –

Comme au bord d’océan – écume avine.

 

Et tous ces amants qui bâtissent un monde –

A leurs flammes ne peuvent être ravis

Ils nous envoient de petits ballons-sondes

Qui s’en vont voler sur notre parvis

On les entend heurtant le fil des heures –

Tendant le temps de leurs minces soupirs

Ils fondent leurs voix sans même un seul heurt

Doucement je m’en pénètre et respire.

 

Il y a ce halo large de lumières

Où pavoisent en une grande vitesse

S’évanouissant dans la grande artère

Ces serpentins qui sans-cesse apparaissent

Du gouffre sombre comme de Saturne –

Ces anneaux qui nous ont vraiment reliés

En un même mouvement qui résume

La nuit où les cités sont nos alliés.

 

Dans ce poème-manifeste, l’auteur fait part au lecteur de sa conception propre de l’acte poétique qui est loin d’être un simple exercice de versification compassé et artificiel (ce n’est pas  jeu où se traînent des vers ) comme chez les amateurs non-doués mais il s’incruste , par contre , dans une activité linguistique à triple dimension   : esthétique , psycho- existentielle  et humaine  . En ce qui concerne la première dimension , le rôle du poète est  de purifier la langue de toutes  les vulgarités occasionnées par l’amoncellement des sens référentiels afin de l’élever à un  haut niveau de perfection et de limpidité (c’est un feu où j’entraîne ma bohème la beauté fait irruption comme un lemme éclaircissant tout mon verbe à revers   –  j’habille un poème pour qu’il me seille de parcourir un chemin dans ces places où ne se fatigue ma solitude à se remplir de toutes belles traces que je fais planer loin en altitude  ). Quant à la seconde , elle consiste à trouver dans le poème un refuge où  le poète  jouit de la quiétude et  se ressource de la pitance spirituelle qui  lui manque dans le réel (la beauté fait irruption comme un lemme éclaircissant tout mon verbe à revers de ma situation là sans fortune ) . La dimension humaine , enfin , est de  combattre le mal dans toutes ses formes  que l’auteur  symbolise ici par l’obscurité et à remplir le monde de lumière qu’il puise dans les étoiles   ( Pour allumer des étoiles ) . Un programme reluisant et séduisant  auquel  doivent adhérer  tous les poètes  sans exception toutes tendances et convictions réunies.

 

 

 

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