Quatre poèmes de Fatima Maaouia – Poète tuniso-algérienne -Tunis

Fatima Maaouia

Ce n’était qu’un peu de pain  

 

Un peu brûlée, un peu déchirée sur les bords

Comme son auteure

Mais fin prête aux premières aurores

Ce n’est qu’un peu de pain, un peu de pain

Aghroum

Battant à toutes vapeurs

Pavillon arômes

Qui font chavirer le cœur

Et tourner les têtes

Un peu de pain

Ma galette,

Planète Émoi

Ce n’est qu’un peu de pain, un peu de pain

Que les femmes de chez moi

Émotion au bout des doigts

Pétrissaient chaque jour pour la maisonnée

Et les moudjahidines des montagnes voisines

Que la nuit sans fin

Ratissait, moissonnait

Et ratissait sans fin au peigne fin

De toute leur farine

Avec ardeur et foi, pressant le levain

D’aller toujours plus vite, plus haut et plus fort

Que le froid et l’infortune !

Donnant même parfois de la claque et de la voix

Encore ! Encore ! Un effort !

Afin de battre tous les records:

Résister au froid

Pour tromper la faim de destin

Ce n’est qu’un peu de pain,

Un peu de pain

Dans la corbeille de leur bras

Pour leurs gamins

Et les hommes de feu et de combat

Galette berbère, si populaire !

Tout un monde !

Ronde Montgolfière

Comme pleine lune

A la Une

Du monde!

Ce n’était qu’un peu de pain

Un peu de pain

Encore plus de raison

De respecter ce fait marquant et croustillant

Toutes saisons des maisons

Fleur émotion

Membre entière de la révolution

Bouclée toujours à l’instant

Et coupée en parts égalitaires

Pour changer à l’instant l’humeur

De l’instant

Ce n’était qu’un peu de pain à offrir

Mais un pain plein

De flammes

Qui nourrissait l’âme

Et guérissait de leurs blessures

Les hommes et femmes en armes

De la grande aventure

Souvent sans chaussures

Un peu de pain

Et le temps d’un feu de camp

Contre la faune sauvage

Et le cruel abattage

On déposait armes et bagages

Aux pieds des monts

Ce n’était qu’un peu de pain …

Galette planète des temps forts

De la galère, des menottes et du mors

Et des femmes guerrières de naguère

Un peu de pain

La lune, quoi ! Cette étoile du jour

Sans laquelle, on était tous, au matin

Morts!

 

 

Fable de   La  Fontaine

 
J’ai demandé à la fontaine 
De Sétif, 
Sein nu
Inconnu de La Fontaine
De l’autre Rif…

…………….

Pourquoi à Sétif
Armé de cailloux 
Un voyou
Marteau
Pourtant barbu
A arraché
Au rocher 
Boyaux
Tifs
Et joyaux
…………….

Gosier à sec d’eau 
Secouée de terribles soubresauts 
Et tremblements convulsifs
La fontaine,
Qui décidément, n’avait plus assez d’eau
Ni les mots de La Fontaine
Pour exprimer ses maux 
N’exhala d’abord que tristes soupirs et sanglots

Puis, portée par toute l’eau 
Et toute la peine 
Accumulée dans ses veines 
Par la haine

Vidant son cœur
Sa peine
Et sa douleur
Coulèrent longuement 
En flots continus
De son sein nu
Inondant la terre entière de ses tourments

Écoutons-là, un moment !

Sétif, de jour et de nuit
Est connue par sa Fontaine 
Qui ne date pas d’aujourd’hui 
Et n’a jamais fait de mal à autrui

Mais pas de ces animaux…

…………….

Moi, qui ne suis que murmure et frisson d’eau 
Je crois pourtant dur comme fer…
Comme ne croient guère les frères …
Où ne court que rouille et croît le fer
Dans les artères….

…………….

Je crois que les animaux sont nos vrais frères 
Ils donnent leur cœur à la terre entière
Et font du bien
Au cœur triste
Et pas bien

A ce titre
Il convient
De les aimer d’amour inspiré et sincère
Comme les vieilles vivantes
Et tendres pierres
Qui sont une sorte de Vivifiante 
Prière…

Dans leurs yeux phare
Est – ce 
Hasard ?
Il y a sur les bords 
Comme des traînées d’or 
En laisse 
Sorte d’alchimie rare
Qui ouvre en quelque sorte 
Les portes
Où s’engouffre avec amour
Le souffle du regard

…………….

Les animaux
De chair, d’esprit et de lumière
Eau claire 
Qui ne pousse guère 
Dans les cœurs de pierre
Qui m’ont jetée la pierre
Et au sabre
Déchiré mon sein pierre et marbre…

Ceux- là, 
Glabres
Amoureux des lacets et trépas 
Qui tirent à bout portant
Sur la lumière 
Adorent une pierre pourtant

…………….

Adorent une pierre pourtant
Et arborent haut
Le sceau 
De la prière 
Au front
Mais… contre le beau temps
Développant tout le temps 
Furoncles, soufre, plomb
Pustules et boutons en béton

Ils font leurs prières…
Dans le sens contraire de la terre…

Et leurs ablutions à l’envers…

Toute l’eau de ma fontaine n’y pourra rien faire
Du papier émeri ou de verre
Seraient nécessaires.

VŒUX

 

 

De terre en terre 
Et d’ île en île
Par charrettes,
Barils
Bateaux frisson vapeur
Avions cargos Éther
Brouettes, bras plein air
Plis, messagers du cœur
Paniers de toutes les couleurs
Corbeilles entières
Miel de la bouche même des abeilles

J’ai envoyé

A tire d’aile
Via terres, ciels 
Mers émeraude et mail arc en ciel

Sur les ailes 
Ruban Eveil 
Et rondes ailes des hirondelles

A la ronde 
J’ai envoyé

Sur du papier magique
Et soie 
Un bijou musique 
Amour, ferveur azur et joie 
J’envoie

Oui
J’ai envoyé !

Une cargaison de vœux
Planète fleurs
Les meilleurs
De l’année
Pour bluffer 
La nouvelle année
Afin qu’elle soit ma bonne fée 
Et que parfumée et emballée
Elle me souhaite bonne année
Et soit pour des années…
Mon amie et celle de mes amis.

 

Vœux..en veux-tu, en voilà !

365 Marches   et  paliers  et moi

 

Me voici devant le Temple du Temps
Des Temps Pliés 
Comme si j’étais devant vous !

Mon sang bout 
La vache, mise au clou
Va- t-elle brûler jusqu’au bout
Nos derniers vassaux
Par les deux bouts ?

D’une traite
De malade
Ou de fou
J’escalade
Quatre à quatre
Les 365 marches et paliers
De l’année qui naît
Au coin de l’âtre
Sous un palmier
Troncs arrosé de vœux et mots doux 
Par tous les êtres
Encore debout
En état …
De l’être 
Quand ils ont un vrai État

De peur que sans crier gare
Sans audit, ni passation de pouvoir
Celle coulée
Ne parte définitivement à la retraite
Et dans la foulée
Emporte dans la tombe 
À jamais 
Le plus important !
Le printemps 
Pieds et poings liés 
Qui donne pieds et jambes 
A l’air inhalé

Pour mémoire
Après toute la poix et la cigue 
qu’elle nous a forcé avec générosité 
À boire?
Quel poison hideux
Nous prépare 
Avant son départ
La vilaine croquemitaine
Des plaines 
Puant cire, plomb
Boue et naphtaline
Respirant à peine
D’un seul poumon 
Et malgré tout refusant de plier échine ?

Quel feu
Passion à vivre, lueur d’espoir
Belle histoire
Subtilisés à l’homme
A qui mieux mieux 
Par ses pairs
De zone en zone
Et de lieu en lieu
Cache t-elle encore aux yeux ?

Quoi d’autre ? Feu ?
Odeur d’essence et de brûlé !

D’une traite…
Peu importe brûlures et bleus
Poignets en sang
Remontant le temps
Je dois de suite, délivrer le printemps 
Ligoté en marge du temps
Et soustraire
Aux dents de la vieille sorcière
Pour les utiliser au mieux 
Les hormones du chant 
Et les graines repère Vert 
Du beau temps…

Génial!
Son ratelier usé à mauvais escient
Sur les dents du gel 
Et mauvais temps
Volant en éclats 
Je ne mets pas longtemps 
A voir que répondant au doigt et à l’oeil
A je ne sais quel vile agenda 
Aiguisant outils 
Roue, pal, scalpel et bistouri 
La vielle
A aussi appris 
A envoyer au noir et de nuit
Des mails incendiaires
A la gloire des attentats
Guet- apens, guerres
Et coups d’état 
Et répandu à travers champs
Le sang de milliers de colombes
Expédiées froidement outre-tombe
Pour refus de mener au bal
Ses hoquets, râles 
Et avaient pour changer l’atmosphère
Décidé bien au contraire 
D’en découdre
Avec son baroud et sa poudre
Son baratin
Et son jasmin

Franchement 
Oui , ou non ?
Sachant, que je n’ai peur ni de son sel
Ni honte face à elle 
Dois -je me taire 
Et laisser faire ?

Et bien non !
Ou plutôt oui !

Avant qu’elle trouve place dans un musée
Je vais lui dire son fait
A la gueuse, mauvaise fée 
Pour tous ses innombrables méfaits
Le jasmin contrefait
Les rêves défaits
Et lui tirer les vers du nez
Quel colis piégé, mine anti personnelle 
Ou nuit qu’on pense à jamais abolie
Se mijote sous le ciel ?

Ni prison, ni tempêtes 
Rien ne m’arrête
Quand je me mets en tête 
De dire ses quatre vérités
A quelqu’un
Qui, du reste, n’en n’est pas un 
Puisque , il n’en n’a pas en fait une seule de vérité non contrefaite

D’ailleurs 
Interrogez
A ce sujet
Oiseaux et fleurs !
Interrogez forêts oasis et vergers
Qu’ on veut abroger !

Si l’un, même qu’on déplume
Vole

Et l’autre même dans les pommes
Embaume

C’est que jour après jour
J’ai en vérité plongé
Mes mains dans la fiole
De l’encrier Vérité 
Pour le dire en Entier

C’est que jour après jour
Et au jour le jour
J’ai toujours

Pour lutter contre le froid
Et soigner les plaies
Humectés de rosée
Et allumé mes doigts 
En bougies à la fois
Aspiré le venin et aspergé
Leurs paumes
De baume 
D’amour et de poésie

Si je vous dis…vertige !

Devant ma détermination, 
A ma grande surprise 
Verte de colère 
Mais lâchant enfin prise
La vieille sorcière 
Fofolle de déserts et démolitions
Desserre crocs et serres

Emotion !

Frou frou d’ailes…

Tombant du ciel
Un vol d’oiseaux, ailes solidaires
Se répandit sur toute la terre !

C’est Merveilleux !

Meilleurs vœux ! Meilleurs voeux !

Sans façon et de mille façons !
Meilleurs vœux ! Meilleurs voeux…
Faits maison …
Les meilleurs de la terre 
Et de la saison !

Meilleurs voeux! Meilleurs voeux! 
Amis de tous les horizons !

Malgré arthroses ecchymoses 
Et guerre
Vous n’êtes pas peu de chose !

Pour vous, filles et garçons de la terre 
Dont on fait moisson
Les plus belles roses
Mes poèmes les plus chers 
Qui, pour les beaux yeux du Printemps 
Osent
En grand
Les couleurs de la terre.

 

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