Pleut-il vraiment Monsieur soleil ? par : Bernard Fouché ( le Berger) – France

12974462_1134639219931609_3699235694730239457_n

Bernard Fouché – France

Pleut-il vraiment. Monsieur soleil.

J’ai acheté des crayons de couleur
Il pleut,je dessine un soleil
Il n’y a pas d’enfants
Je dessine un manège
Il se remplit peu à peu
Il n’y a pas d’amour
Je dessine des amoureux
Avec un cœur dans leur dos
Il n’y a pas de voiture
Il n’y a pas de bruit
Il y a trop de béton
Je dessine des arbres
Roses, bleus, verts,
Il n’y a pas de saison
Je dessine des parterres de printemps
Les gens sont seuls
Je dessine des animaux
Des chiens, des chats, des pigeons
Il n’y a pas d’amis
Je dessine une table de Roi
Et des verres en carton
Pour noyer la solitude
Le vent se lève
Et efface la feuille
Je redessine un soleil
Des enfants
Des arbres
Des animaux
Des amoureux
Des amis
Je veux bien lui ajouter un petit nuage
À condition qu’il me sourît…
Le Berger

 

 

Commentaire de Mohamed Salah Ben Amor :

 

Comme à son accoutumée, le poète français Bernard Fouché  s’attaque aux questions les plus brûlantes relatives à la situation de l’homme d’aujourd’hui .Et celle qu’il choisit de  traiter cette fois est le sentiment d’insatisfaction qui ronge l’individu  en raison de la solitude à laquelle il fait face au sein d’une société de plus en plus déshumanisée .Néanmoins , si cet état  peut dégénérer chez l’homme ordinaire en un cas pathologique et plus précisément vers la frustration  que les psychologues définissent comme « une réponse émotionnelle à une opposition » et qui se caractérise par la colère et le sentiment d’injustice,  lesquels peuvent ébranler tout le système affectif de l’individu, les artistes, eux, et le poète en est un, du fait qu’il dessine et peint avec les mots, sont en mesure d’en venir à bout  grâce au monde imaginaire  compensatoire foisonnant de rêves qu’ils se créent  avec les formes, les couleurs, les sons ou les mots .Et c’est ce à quoi s’est adonné notre poète tout au long de son texte  où il s’est efforcé de combler  les éléments vitaux qui lui manquent dans son entourage (Il n’y a pas d’enfants – Il n’y a pas d’amour – Il n’y a pas de voiture – Il n’y a pas de bruit – Il n’y a pas de saison – Il n’y a pas d’amis )en les dessinant (Je dessine un manège/ Il se remplit peu à peu – Je dessine des amoureux – Je dessine des arbres /Roses, bleus, verts – Je dessine des parterres de printemps – Je dessine des animaux/Des chiens, des chats, des pigeons – Je dessine une table de Roi…).Mais le poète n’est peut-être pas conscient que cette tendance  enfiévrée à s’évader du vide imposé par la réalité stérile et insipide  cacherait un retour  nostalgique à  la matrice de la mère que les psychanalystes assimilent à un paradis perdu et en même temps un besoin de vaincre l’inquiétude existentielle qui dévore tout humain en constatant qu’ « il est de trop » dans un monde qui existe indépendamment de lui,  d’où cette inclination à se créer un monde imaginaire  pour se donner l’illusion qu’il est lui-aussi créateur  .

Côté style, ce poème se distingue surtout par la simplicité de la langue utilisée et le jeu ludique mis en œuvre emprunté au langage des enfants, tout en étant doté sur le plan sémantique de dimensions  profondes.Un bon poème Bernard bravo!

 

Répondre

Votre adresse email ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont marqués d'une étoile *

*