Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :31–Les poèmes de Didier Hippon: 31-8 : Tiens

Didier Hippon

 

Tiens

Regarde 

On écrit 

Toujours 

Au soleil 

Couchant 

Est-ce 

Le mythe 

De l’artiste 

Qui trotte 

En nous

Quand l’on 

Se confie 

A notre cœur ? 

Bienvenue 

A toi chez nous 

Notre autre monde 

Oû coule l’encre indélébile 

De notre passion 

 

Après avoir essayé, à ses débuts et pendant trois ou quatre années de suite, le genre de la prose poétique puis pratiqué le poème en prose sous une forme longue et élancée composée de vers extrêmement courts , voici le poète guadeloupéen Didier Hippon tenter, tout dernièrement, sa chance,  dans le mini-poème , un genre très difficile car il exige comme le haïku une forte condensation des sens et une chute surprenante capable de  fasciner le récepteur qu’il soit auditeur ou  lecteur .

Examinons  de près le texte poétique court qu’il nous propose cette fois pour voir à quel point il répond à ces conditions . L’idée maîtresse qui y a servi au poète  de noyau sémantique générateur est aussi pertinente que plaisante .Il s’agit du dédoublement de la personnalité de l’artiste en général  (  Le mythe de l’artiste qui trotte  en nous)  – et le poète en est un – qui se compose, d’un côté,  d’un humain commun dont les soucis quotidiens ne diffèrent en rien de ceux qui préoccupent n’importe quel  autre mortel et, de l’autre, d’une âme singulière démesurément sensible, et  constamment  branchée sur l’infiniment grand et l’infiniment petit dans lesquels elle puise ses inspirations .Et le caractère spécifique de cette deuxième âme cachée est qu’elle ne se manifeste que brusquement et dans des situations spéciales comme le crépuscule pour l’âme de notre poète(tiens  regarde  on écrit toujours au soleil  couchant )- et ce “toujours” ne concerne, bien entendu ,que lui,  car l’activité créatrice atteint  son point  culminant chez  chaque artiste  dans un cadre spatio-temporel particulier .Ensuite , cette âme ou psyché constitue un monde à part à l’intérieur du Moi du poète , un monde magique ou comme il le dit «  mythique » – rappelons-nous que le critique Charles Mauron a appelé les métaphores obsédantes chez le poète ou l’écrivain «  mythe personnel ».Est-ce une coïncidence ici ? Et ce monde merveilleux s’interfère avec le monde conscient de l’artiste au niveau des émotions dont le siège, selon les croyances communes, est le cœur(le mythe  de l’artiste  qui trotte en nous quand l’on se confie à notre cœur – bienvenue  à toi chez nous notre autre monde ou coule l’encre indélébile de notre passion ).

Au niveau du style ,cette oscillation, de bout en bout,  entre le conscient et l’inconscient, le découvert et le caché, le mortel et l’éternel, le concret et l’abstrait a conféré au texte un caractère original et un charme certain .Félicitations Didier !

Répondre

Votre adresse email ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont marqués d'une étoile *

*