Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor : 29–Les poèmes en duo d’Elena Martinez et Mohammed El Qoch: 26 -4: Révélations…!

Elena Martinez et Mohammed El Qoch

 

J’ai aimé cette brusque et légère bruine  

Qui mouilla nos têtes, ce jour là,

Des épaules, aux pieds

Le firmament jaloux

Scruta nos pas et nous inonda 

 

J’ai aimé les vieux murs blancs

Où nous avons inscrits

Deux mots et qui n’ont plus

Qu’un morceau de ciel pour toiture

Et qui, par les ronces mordues,

Souffrent en silence pour dissimuler 

Leurs blessures ridées

 

J’ai aimé les fleurs dans ce recueil imagé

Cahier fleuri de ma grand-mère,

Où son rêve était prisonnier

Près du portrait d’un militaire souriant

A l’allure élégante des vieux soldats

 

J’ai aimé ce sourire qui étincela ma vie

Ma déchirure béante, ma plaie,

Sur ces cils, j’ai vu mon devenir,

Le chemin qui menait aux songes

Nul besoin de phare, ses yeux,

L’émeraude scintille

 

J’ai aimé les choses du passé lointain

Ces rires au clair des chandelles

Ces longues veillées nocturnes 

J’ai aimé les lieux chargés d’histoire

Me rappelant les prénoms effacés 

Les pages de la mémoire

 

J’ai senti l’étreinte et la caresse immobiles

 Des ombres des réminiscences

 J’ai fermé les yeux que tes halos submergent 

 J’ai repris le poids de ma vie

 Ma nuit jouit sous l’étoile des cieux

 

Revoilà le talentueux duo qui s’unit et se sépare selon les lois  intrinsèques de  l’inspiration qui  est parfois collective   et revêt parfois un caractère  strictement individuel .Et entre ces va-et-vient,   il nous laisse quelques fois  une longue période  sur notre faim .Dans ce nouveau poème à quatre pattes , le duo donne une leçon remarquable à ceux qui confondent  l’amour en tant que sentiment que des centaines de millions de personnes peuvent éprouver et la poésie amoureuse qui est avant tout un art  et exige  donc du talent  dont ne jouit qu’une catégorie bien restreinte de doués  Et la preuve en est  ces images de pure création que leur imagination et leur sensibilité esthétique ont conçues . Est-il  , en effet , à la portée de n’importe qui  de se représenter cette jalousie vengeresse du ciel qui  le pousse à déverser sa pluie  sur les deux tourtereaux ?  Ou cette nostalgie  émouvante qui se dégage  de la deuxième   et la troisième  strophes où est projeté l’état d’âme douloureux  de la locutrice et du locuteur :  d’abord sur un vieux mur sans plafond  au long duquel  ont grimpé des ronces mordues  ,  ensuite sur le recueil imagé  d’une grand-mère qui  revit  avec tant de peine et de regret ses souvenirs de jeunesse à jamais révolus ? Ou cette fine interception du devenir  personnel dans les cils  et les yeux du bien-aimé assimilés à des émeraudes ?  Ou cette fuite en arrière vers l’ambiance chaleureuse  et joyeuse des veillées nocturnes afin   de s’y ressourcer  les forces morales nécessaires à  vaincre la mélancolie du présent ? Voila ce qu’on appelle poésie amoureuse et non cette déflagration de sentiments bruts traités  artificiellement  au moyen d’une versification compassée.

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