Je suis au ciel par : Gaëtan Parisi – poète italien – Belgique

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Le poète Gaëtan Parisi

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Choisis ta mort
Choisis ton camp
Aborde le regard des passants
Efface de ta bouche
Mets en touche
Le remord
L’amour n’est jamais offert
A force de le taire
Il se perd
Perds ta main de fer
Passe la porte de l’enfer
Sur l’écorce douce des bouleaux
Laisse ta peau en lambeau
Choisis ta mort
Choisis ton sort
Ton sort est dans un nœud
Aimer
Aimer est un vœu
Défiguré
Torturé
Fissuré
Son silence inflige
Des blessures
Des fêlures
Le mal se fige
Quand tout se bouscule
Quand tout bascule
Quand le froid
Des nuits sans draps
Nous fait perdre la foi
Quand l’arme de ses bras
L’absence
Lancinante
Sans combat
Trucide nos sens
Choisis ta mort
La mort rassure
Comme le blanc azur
L’azur d’une promesse
Déesse
Abuse de mon corps
Use de ton cœur
Renonce au futur
Obscur
Accepte le jour
Jour après jour
Chaque jour
Creuse un thème
Ce n’est pas un blasphème
Dis je t’aime
Je t’aime
Je t’aime
Encore je t’aime
Choisis ta mort
Étale ton sang sur un parchemin
Assume ce destin
Assure un chemin
Avec une autre calligraphie
Ecris
Un lendemain
Un lien
Qui unit
Tu es pour mes nuits
Un astre qui brille
L’incandescence d’un rêve infini
La vie
Au delà de l’oubli
Tes yeux sont la panoplie
Des couleurs
De l’arc-en-ciel
Je suis au ciel.

 

Commentaire de Mohamed Salah Ben Amor :
Ce poème est conçu sous la forme d’un discours injonctif dont la plupart des actes de langage qu’il comporte appartiennent à ce que John Searle (né en 1932) a appelé la catégorie des « directifs » c.à.d. les demandes adressées par un locuteur à un destinataire donné pour obtenir de lui des choses bien déterminées .Dans le contexte ci-présent, le locuteur a joué, du début jusqu’à la fin , sur le sens du pronom personnel « tu », en laissant dans l’ambigüité ou , si l’on veut , dans la pénombre l’identité réelle de celui ou de celle à qui il parle .S’adresse-t-il à celle qu’il appelle « déesse » citée dans le vers 39 ? Et dans ce cas qui pourrait-elle bien être ? Une bien-aimée ou la mort ? En plus, dans les 38 premiers vers, on a une forte sensation qu’il parle à soi-même et non à une autre personne.
En réalité, les deux notions essentielles autour desquelles s’articule le texte, celles de l’Amour et la Mort, sont, contrairement aux apparences, fortement liées. En effet, Sigmund Freud(1856 – 1939) n’a-t-il pas attribué le vrai amour , l’amour profond et intense à l’instinct de mort qui , avec l’attraction vers le bas qu’il exerce sur l’être humain pour le faire revenir à l’état inanimé dont il est issu , lui fait sentir un mélange de volupté et de douleur insupportable ? (Déesse / abuse de mon corps/ use de ton cœur – dis je t’aime/ Je t’aime/ Je t’aime/Encore je t’aime/Choisis ta mort/ étale ton sang sur un parchemin ).Et cette dualité : Amour /Mort appartient vraisemblablement à la zone irréelle de l’amoureux, voire de l’être humain en général. Ce qui en fait pratiquement une forme atténuée de folie.
Enfin , armés de ces interprétations , le fond du texte pourrait s’éclaircir à nos esprits et avoir le sens suivant :un amour fou serait emparé du locuteur et lui aurait occasionné une sorte d’extase douloureuse qui lui aurait fait subir une mort psychologique symbolisée dans le litre ainsi que dans l’ultime vers par ce passage au royaume des âmes ci-haut dans le ciel .
Sur le plan stylistique, notons le rythme frénétique engendré par l’accourcissement des vers et l’usage massif de l’anaphore .D’autre part, le fait de placer le locuteur tout au long du texte au ciel en tant que mort et la bien-aimée sur terre en vie a conféré au poème un charme particulier matérialisé par ce dialogue épatant entre l’ici et l’au-delà.

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