Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :39– Les poèmes d’Arezki Hatem:39 -5 :Dans le faubourg de ma vie

Arezki Hatem

 

Dans le faubourg de ma vie

Loin de la grande cité

Vit mon âme délaissée.

Dans le faubourg de ma vie,

Mes voisins sont noctambules 

Serinant la même rengaine enrayée :

On ne dort jamais car c’est des tétons de la nuit, 

Que nous buvons le lait de la mélancolie

Dans le faubourg de ma vie,

Les enfants vieillissent vite

Les vieux ne meurent jamais

Les femmes n’allaitent guère

Tout le monde se guerroie 

Pour qu’en fin on enterre les morts

Dans un cimetière en commun

Dans le faubourg de ma vie

Le ciel est éternellement plantureux

Sans qu’une goutte de pluie n’ose s’échapper

Dans le faubourg de ma vie, La nuit s’éternise

Le jour s’amenuise  Le rêve est cauchemar

Dans le faubourg de ma vie,

Je lutte main nu

Contre un ennemi au mille facies 

Dans le faubourg de ma vie, 

La vie n’est nullement vie, 

Mais un semblant de vie !

 

 

Dans cet autoportrait psychologique marqué par une mélancolie extrêmement profonde et à travers lequel se profile une vision cauchemardesque du Moi ( ma / mon/je  : 9 fois ), de l’Autre (mes voisins – les enfants  – les vieux – les femmes – tout le monde – un ennemi )  et du monde (le ciel – la nuit – le jour – la grande cité ) deux points attirent , tout particulièrement , l’attention : l’un sur le plan sémantique,  à savoir une rupture totale avec l’univers , laquelle est le signe révélateur et sûr d’une âme tragique selon le sens que donne le philosophe hongrois  Georg Lukács (1885 –1971)au terme “tragédie” et l’autre du point de vue technique : la tendance très prononcée chez le poète à aller au fond des choses par l’usage massif des deux procédés contraires mais  complémentaires : l’amplification  et l’amenuisement, dans l’assombrissement des horizons intérieurs  (  mon âme délaissée  ) et extérieurs (  le ciel est éternellement plantureux – la nuit s’éternise – le jour s’amenuise – nous buvons le lait de la mélancolie – on enterre les morts dans un cimetière en commun …etc.) qui se rejoignent voire se confondent, en réalité, du fait que l’extérieur que l’auteur décrit n’est qu’une projection de son état d’âme meurtri , conformément à la nature de la métaphore charnière spéciale du faubourg de la vie qu’il a utilisée .Ceci est , grosso modo , le fond de ce qui a été dit dans ce poème .Mais est-il conforme à ce qui n’a pas été dit s’il y en a ? En d’autres termes, ce paysage intérieur totalement obscur serait-il la conséquence d’une tristesse constante du genre natif et inné ou bien un simple état d’âme passager ?

Seule la lecture approfondie de plusieurs autres textes de ce poète nous permettra d’avoir une réponse fiable à cette question !

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