Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :38– Les poèmes d’Abdelmalek Rochdi:38 -4 : Mes vers

Abdelmalek Rochdi:

 

Qu’espères-tu, lecteur ?
La clef de l’Éden ?
Un corps que mes vers feront
Frémir ?
Un visage qu’ils embelliront
Ou des yeux sur lesquels ils passeront du
Khôl ?
Mes vers sont la mer et la nuit ,
Le soleil et la verdure, le sang qui
Coule dans tes veines.
Ils vont par monts et par vaux,
Quêtant une plainte de-ci, un
Sourire de-là.
Ils sont les larmes qui voilent
Tes yeux, ils écoutent les tombes
Et s’élèvent avec les âmes.
Mes vers sont ta vie, mon frère…

A chaque vrai poète sa conception propre de l’essence et de la fonction de la poésie. Et ceux qui n’en ont pas ne peuvent être considérés que de simples versificateurs amateurs, car tout bon manieur de mots doit nécessairement s’interroger, avant toute chose, sur le pourquoi et le comment de l’usage dont il fait de la langue, afin de bien connaître son champ d’action ,étant donné que « Quant dire c’est faire » comme l’a si bien exprimé le philosophe anglais John Austin( 1911 – 1960),ce qui a toujours été indispensable pour atteindre la singularité, le but le plus élevé convoité par les hommes et les femmes de plume . Et connaissez-vous un seul grand écrivain dont l’œuvre est dépourvue de composantes spécifiques, que ce soit au niveau thématique ou stylistique ? D’où l’importance du manifeste pour tout vrai créateur.
Dans le poème ci-haut qui appartient clairement à ce genre littéraire, nous sont énumérées une à une les caractéristiques de l’écriture de son auteur, lesquelles ont été réparties sur deux volets opposés : l’un comporte  les éléments qui ne doivent pas figurer dans cette écriture (dans les cinq premiers vers) et l’autre ceux qui forment ses principaux éléments constitutifs.
Dans le registre négatif, le texte nous informe que la poésie de l’auteur n’est nullement moralisante ou métaphysique visant à garantir au lecteur le salut dans l’au-delà ; autrement dit, le poète n’est ni prêtre, ni prophète. Elle n’a pas non plus un rôle excitant ou “embellisseur” .Et de  ce côté-là, il n’est point du rôle du poète de satisfaire les désirs corporels passagers et superficiels du récepteur .Quant au registre positif, le poète y regroupe cinq éléments auxquels il emprunte les symboles naturels suivants : mer, nuit, soleil, verdure, sang qu’il rattache tous , à la fin du texte, à une source commune : la Vie ,tout en définissant son rôle comme une quête continuelle de l’humain et du spirituel.
Un poème profond qui nous apporte un bon éclairage sur l’univers de ce poète et le rôle positif et engagé qu’il s’est assigné dans son art.

 

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