Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor : 26–Les poèmes de Gaëtan Parisi 26-6 : Déesse

Gaëtan Parisi

C’est en vain que je rêve

Entre soirs et matins

En questionnant les ombres

Alors que l’obscurité ne sait rien

 

C’est en vain que je sombre

Entre cris et silences

Il n’y a plus de renaissance

Pas de photons, pas de luminance

 

C’est en vain que j’avance

Alors que se ferme le destin

L’ultime chemin

Un tapis de pierres

Amer

Hors lumière

 

Jamais le cœur n’a saisi vraiment les secrets du monde

Les humeurs vagabondes

L’amour même d’une seconde

Fourberie immonde

Le remord m’inonde

Ma vie s’est fendue

Perdue

Dans les derniers songes

Je plonge

 

C’est en vain que je pense

L’éloignement s’est allié à l’oubli

Je pleure

Je pleure depuis que tu es partie

L’absence creuse les sillons de mes souvenirs

Je sais que jamais tu ne vas revenir

 

Je rêve

Je rêve encore

De la lactescence de ta peau nue

De ta chevelure de blé d’or

De tes fous rires de fruits rouges

De tes chants azurs

 

Aujourd’hui rien n’est plus sûr

Il n’y a plus de jour nouveau

L’aurore est un présent

Un processus lent

Désespérant

 

C’est en vain que je lutte

Contre vents, vagues et marées

Dans le théâtre de leurs giboulées

Ma barque est fatiguée

J’ai jeté l’ancre

Sur l’océan salé

Là où je peux flotter

Sans résister

Me balancer

De l’indifférence à la reconnaissance

 

C’est en vain que je peux raconter

L’exil et l’errance

L’ultime déchéance

Il n’y a plus de mouvement

Plus de trajectoire

Le temps se fige un moment

La lumière fuit comme une victoire

S’étale

Comme une prairie d’étoiles

Creusant les sillons de mes territoires

 

J’enregistre la dernière image

De ton visage

De l’âge féérique

Qui s’envole aux vents obliques

Comme le refrain d’un chant ludique

 

C’est en vain que je rêve

Je désespère

De retrouver cette force de bois vert

Mais ce n’est plus un mystère

Tu pars

Tu pars à jamais

Je t’aimais

Je t’aimais tellement

Déesse

Je t’aimais

Ma JEUNESSE 

Sémantiquement , ce poème a été généré comme la plupart  sinon la totalité des poèmes de cet auteur à partir  d’un noyau presque constant  qui consiste  apparemment ici  et jusqu’au dernier  vers ( ma jeunesse ) en  une rupture amoureuse  douloureuse de la part de la bien-aimée .Et  à l’instar de tous les chocs de ce genre que le sujet reçoit comme une effraction violente  de son psyché , ce traumatisme psychique occasionne  inévitablement une angoisse extrême qui crée  chez lui un besoin vital de trouver un échappatoire  capable de le faire  sortir du gouffre .Dès lors ,  nous pouvons distribuer tous les éléments linguistiques signifiants que comporte ce texte  ( mots , syntagmes , phrases  ) sur ces deux  grands axes liés  entre eux par la relation : cause à effet  : le choc reçu d’un côté et la compensation qui s’en est suivie de l’autre  .

Sur le plan esthétique  , le poète a  usé de trois principaux  procédés : le premier est la révélation de la cause   de sa souffrance  au 26ème vers (   Je pleure depuis que tu es partie ) .Ce qui a eu pour effet  d’intensifier le suspens , le second est l’utilisation   massive  de l’emphase ( ou hyperbole ) pour dépeindre  l’intensité du choc affectif qu’il a reçu  ( fourberie immonde le remord m’inonde ma vie s’est fendue perdue dans les derniers songes/je plonge/ L’exil et l’errance l’ultime déchéance, ii n’y a plus de mouvement plus de trajectoire le temps se fige un moment la lumière fuit comme une victoire s’étale comme une prairie d’étoiles creusant les sillons de mes territoires…etc. ) , et le troisième enfin qui est le plus important est  d’avoir fait croire au lecteur ;  tout le long du poème, que la bien-aimée dont il pleure le départ est une femme  de son âge au moment de l’énonciation avant de le surprendre,  à la fin, par le fait  qu’il parlait de sa jeunesse . Mais le plus important est que la reprise d’un même thème,   du moins du même lexique et des mêmes significations apparentes,  n’a pas empêché le poète de rénover   dans la conception des images. Ce qui constitue,  comme à l’accoutumée,  son point fort.

 

 

 

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