Fables de mon jardin…par :Fatima Maaouia –poétesse tuniso-algérienne- Tunis –Tunisie

Fatima Maaouia

 

“Le caoutchouc”

J’aime pas le plastique 
Mais ce pauvre type couché de tout son long
Sous un soleil de plomb,
Ce grand Nil
Immobile
Arbre à eau aux jambes élastiques 
Qui faisait de la gymnastique
Et de la musique à fond
Pour peu qu’on remplissait son gosier 
De fuel à rosiers,

Cette longue liane
Qui gît et rend l’âme 
Sous les flammes 
Toutes griffes dehors …

Sans lui le jardin serait mort.

C’est à croire 
Que tous les feux de l’enfer 
Veulent lui faire la peau.

C’est à croire
Que toutes les lames de couteaux
Affûtées à la flamme
Se sont données le mot
Pour lui faire son affaire 
Juste…pour avoir donné à boire 
A l’herbe et aux moineaux
Et dilué dans l’eau 
Des histoires de troncs imprenables
Et de fruits incroyables.

Condamné à mort
Pour avoir assuré à bon port
Le transport 
De l’eau pour les arbres et fleurs

Le pauvre caoutchouc flancs 
Éventrés.

Pauvre diable !
Habilité à éventer l’été
Et à se battre pied à pied avec le sable
Pour inventer le printemps 
Et l’été.

Pauvre chou
De caoutchouc,
Le plastique n’est pas ma tasse de thé 
Mais là c’est trop!

Entêtés 
Les feux de l’enfer mordent sa peau.
Le gel du soleil 
Dessèche son corps lardé de coups
En bas , en haut,
Ronge ses os
Le vide de son eau.

A le voir
Sûr et certain
Que le soir
Lorsqu’ on l’appellera à faire son devoir
Vis à vis du jardin,

Faut croire 
Qu’hoquetant et fou,
Son long cou 
Secoué de soubresauts 
Va d’abord étouffer et crachotter 
Sanglots 
Paquet de boue
Et caillots 
Avant de donner à tous à boire
Pour que monte dans la tiédeur du soir
Un parfum d’espoir 
Et de renouveau.

Vous me direz que c’est un simple tuyau d’arrosage.
Mais moi je vois autre chose dans ce long corps
Crucifié au sol, qui tire la langue et me dévisage.

Je vois Gaza exsangue
Gaza sans gaz ni eau
Sous embargo.
Je vois des enfants sans eau 
Peau sur les os
Rongés de poux.

Bergers
Jet stoppé net
Par la Bête.

Soldats anonymes
Tombés Rime
Un soir d’hiver
Un jour d’été;

Tombés une nuit
Épis
Ensanglantés 
Pour un drapeau…

Et toi …
Pour rien du tout 
Je pense à vous…

Maudit caoutchouc!

De fil en aiguille 
Pendue à mon cou 
Tu me mènes vers où?

Ah, je vois!
Terres, terres assoiffées d’eau
Qu’on boit 
 Au chantage à Dieu, à l’air 
Aux sous
Et dont on formate les êtres en viles troupeaux.

C’est la stricte vérité 
Le Ginger ébriété
A bruité
L’affaire 
Et je ne parle pas d’électricité 
Tout ça pour n’avoir pas été sage
Et ne pas avoir appliqué a la lettre
Le message 
Des Maitres.

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