Mémoires d’un critique : Comment j’étais venu à la critique d’avant-garde ? (1)par: Mohamed Salah Ben Amor

Hédi Bouhouch ( 1950 – 2017 )

Hassine Loued (1948 – 2018 )

Ahmed Hadhek El Orf

Tous  les écrivains , poètes et  journalistes qui étaient présents sur la scène littéraire en Tunisie à la fin des années soixante et aux  débuts des années soixante-dix   étaient unanimes – et les vivants d’entre eux le sont encore –   que le mouvement d’avant-garde littéraire  dans le pays a été fondé par le nouvelliste et le dramaturge tunisien Ezzedine Madani .Et cette vérité historique n’a jamais fait l’objet d’aucune contestation d’aucune sorte, au point où certains disaient : « Ezzedine Madani est l’avant-garde et l’avant-garde est Ezzedine Madani ».

Cependant en parallèle à ce mouvement qui apparut à la fin de l’année 1968, une critique portant la même qualification « La critique d’avant-garde » avait vu le jour au début de l’année 1970 et cette critique était tout à fait indépendante du mouvement sus cité. Et pour s’en convaincre, il suffit de comparer les théories des critiques d’avant-garde à celles de Ezzedine Mdani qu’il a exposées dans son ouvrage fondateur intitulé « Sur la littérature expérimentale »(Tunis 1972).

Cette critique a été fondée par moi-même  et feu Hédi Bouhouch ( 1950 – 2017 )en 1970 sur sa proposition, avant qu’il ne se retire définitivement l’année suivante du milieu littéraire pour se consacrer à ses études vu qu’il était normalien et qu’il n’avait le droit de redoubler qu’une seule fois pendant les quatre années de la maîtrise .Et il fut remplacé par Hassine Loued (1948 – 2018 ) qui prenait part de temps en temps à nos discussions puis Hassine se retira à son tour à la fin de 1972 pour préparer son mémoire du CAR ( certificat d’aptitude à la recherche)et fut suppléé par Ahmed Hadhek Alourf, et ce, jusqu’au mois de novembre 1972, date de mon départ de Tunis aux îles de l’île Kerkennah ( sud-est de la Tunisie)où je fus nommé dans l’enseignement  .

Cette mise au point est nécessaire, parce que l’une des idées fausses qui avaientt toujours circulé depuis les débuts des années soixante-dix dans le milieu culturel tunisien est que c’est  moiqui était le fondateur de la critique littéraire d’avant-garde en Tunisie avant que Hédi Bouhouch  puis feu Hassine Loued puis Ahmed Hadhek El Orf ne se soient joints à moi .Et cette idée erronée n’avait aucune raison d’être, parce que tous les écrivains , les poètes et les journalistes culturels qui étaient à cette époque présents dans le milieu littéraire tunisien avant l’apparition de l’avant-garde littéraire à la fin de 1968 et même  au moment de son apogée en 1969,se rappellent que je n’avais aucun lien avec ce groupe et que j’écrivais sur tous les courants littéraires dans le pays .Et la preuve est cette longue étude qui m’avait été publiée dans le supplément culturel du journal « El Aamal » les 10 et 17 octobre 1969 sous le titre «  Aperçu sur les étapes de l’évolution de la poésie tunisienne moderne » dans laquelle j’ai essayé de dresser  un tableau général  de la poésie tunisienne depuis  l’époque d’Aboulkacem Chebbi ( 1909 – 1934 ) jusqu’au moment de l’élaboration de  cette étude, sans exclure la moindre tendance ou  sensibilité,  avant de la  clore par ce paragraphe de quatre lignes sur la poésie en prose sans le qualifier de « poésie d’avant-garde » :

« C’est la dernière étape et elle n’a commencé que dernièrement. Et elle se fonde sur la combinaison entre trois caractéristiques : un traitement nouveau de la langue, une musicalité poétique inspirée de la poésie dialectale et une émotion spontanéeet libre . Et parmi les poètes appartenant à cette tendance Tahar Hammami, Fadhila Chebbi, Mohamed Habib Zannad ,Mohamed Masmouli et Mahmoud Tounsi ».

Et voici la liste des poètes tunisiens dont j’ai parlé dans cette étude : Aboulkacem Chebbi,Tahar Qassar, Chedli Atallah,Ahmed Mokhtar Louzir,Ahmed Loghmani, Hédi Madani, Sadok Mazigh,El Arbi Kabbadi, Jalaleddine Naccache, Mnaouer Smadeh,Abdelaziz Kacem, Mohamed Mezhoud , Abdelmajid Ben Jeddou, Mustapha Kraief, Hédi Noamen, Jameleddine Hamdi, Noureddine Sammoud, Jaafar Majid,Ahmed Kedidi, Souilmi Boujemaa,Mohieddine Khraief ,Zoubeida Bchir Midani ben Salah, Taieb Riahi, Ahmed El Mokhtar El Hédi.

En ce moment, le mouvement littéraire d’avant-garde qui existait depuis la fin de 1968 suscitait de nombreux  débats houleux mais je me contentais de le suivre de loin comme n’importe quel autre courant.

Pour cette raison, je ne parlerai dans mes mémoires que de la critique d’avant-garde,  parce que c’était le seul auquel j’avais  prit part Quant au mouvement de la littérature d’avant-garde , c’est son fondateur et son théoricien Ezzedine Madani qui le connait mieux que toute autre personne .Et je pense qu’un chercheur spécialisé comme Mohamed El May rendrait un grand service à la littérature tunisienne s’il faisait un entretien  avec lui sur ce sujet et le publiait dans un livre.

Dans quelles circonstances j’étais venu à la critique littéraire d’avant-garde et avec quelle stratégie ?

( A suivre )

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