Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor : 26–Les poèmes de Gaëtan Parisi : 26 -19 : Lumière

Gaëtan Parisi

 

Telle une aquarelle De Wafae Abid*

Les lumières de la vie sont belles

Mais la mélancolie est mon habit

Je veux que brille le ciel dans ma nuit

Que des couleurs diluent mon ennui

Le noir est le centre de mon univers

Un univers où le ciel ne rejoint jamais la terre

Deux lignes infinies parallèles

D’où n’émerge pas le soleil

J’attends l’inaccessible lumière

Dorée

Cendrée

Eblouissante

Eclatante

Aveuglante

Étincelante

Brillante

Qui suffit à imaginer toute ta beauté

Lorsque je te caresse dans le noir

Lumière noire

Fluorescence blanche immaculée

Lumière de feu Incandescence des corps amoureux

Lumière bleue

Luminescence de mon désir vertueux

Peu m’importe

Pourvu que son rayonnement

Me transporte Donne un sens à ma vie

Des reflets à mes envies

Des illusions à mes rêves

De l’espoir sans trêves

Mon abime n’en finit pas

Je suis proche du trépas

Les ténèbres me cernent

Le tunnel où j’erre se referme

J’ai allumé une dernière flamme

Pour que  les murs de mon âme

Eternisent ta silhouette

Mais ton ombre reste muette

Le silence s’asphyxie

Le néant aussi est frappé d’apoplexie

Où sont les énergies violettes

Les arcs-en-ciel de promesses

Les clartés célestes

J’accroche le spectre de ta lune

Tu es l’onde de ma fortune

Déshabille mon désespoir

Les étoiles scintillent dans le noir

Ce n’est pas un hasard

Si toute histoire commence dès le premier soir

 

 Wafae Abid : poétesse marocaine contemporaine

 

Dans ce nouveau poème,  l’auteur  , qui appartient , comme nous l’avons mentionné plus d’une fois , à la catégorie des poètes dits « à expérience » c.à.d. ceux dont les écrits tournent autour d’un thème majeur ou constant,  prouve , encore une fois ,  que le thème de la rupture amoureuse dont il a fait l’axe central de cette expérience est tellement riche qu’il est capable d’en générer un nombre infini de sous-thèmes, tel que celui qu’il aborde dans ce texte : l’enfer affectif engendré par la rupture et la tentative désespérée de s’en sortir .D’où la construction de ce poème autour d’une dualité principale : le réel /et le souhaité ou le fait/et le vouloir .

En ce concerne le premier élément constitutif de cette dualité : le réel ou le fait , le poète brosse un tableau désolant de son état affectif et cognitif qu’il assimile à une détention à perpétuité dans une prison infernale obscure (la mélancolie est mon habit – ma nuit – le noir est le centre de mon univers – un univers où le ciel ne rejoint jamais la terre  – deux lignes infinies parallèles d’où n’émerge pas le soleil – les ténèbres me cernent – le tunnel où j’erre se referme …).

Quant au second élément qui occupe la place la plus prépondérante dans le poème et auquel  l’auteur associe l’image de la lumière  ,  il  l’exploite pour décrire son besoin vital de libération  (Je veux que brille le ciel dans ma nuit/ Que des couleurs diluent mon ennui – J’attends l’inaccessible lumière/Dorée/ Cendrée/ Eblouissante/Eclatante/ / Aveuglante/ Etincelante/ Brillante…).Mais  cette libération ne peut se réaliser qu’avec le retour qu’il sait impossible de l’être cher (J’ai allumé une dernière flamme/ pour que  les murs de mon âme/ Éternisent ta silhouette/ Mais ton ombre reste muette/ Le silence s’asphyxie/ Le néant aussi est frappé d’apoplexie…).Ce qui montre que la tentative du locuteur n’est , dès le début , qu’une échappatoire momentanée du chagrin d’amour qui envahit son âme . Au niveau stylistique , le poète nous a gratifiés comme toujours d’une série de belles images (Le noir est le centre de mon univers/ Un univers où le ciel ne rejoint jamais la terre –  Lorsque je te caresse dans le noir/ Lumière noire/ Fluorescence blanche immaculée/ Lumière de feu incandescence des corps amoureux/ Lumière bleue/ Luminescence de mon désir vertueux  ) doublées  de sonorités agréables  grâce aux couples de rimes régulières et à l’usage  massif de  l’anaphore , de l’asyndète et  de l’accumulation .

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